Souvent, par abus de langage, on assimile la maquette numérique et le BIM. Bien qu’il s’agisse de deux notions voisines et très liées l’une à l’autre (voire avec un recouvrement partiel : « maquette numérique » englobant les maquettes numériques BIM et non BIM), il convient de prêter une attention particulière pour les distinguer. Le sujet de cet article précise d’abord à quoi correspond la notion de maquette numérique en général puis revient sur le cas particulier de la maquette numérique BIM.
Une « maquette numérique », qu’est-ce que c’est ?
Il s’agit d’un objet 100% virtuel. Une maquette numérique est une représentation d’un objet ou ensemble d’objets (véhicule, bâtiment, …), généralement en 3D, réalisée sur ordinateur de façon à l’analyser, le contrôler et en simuler certains comportements. Elle sert à concevoir et/ou représenter un projet ou un objet. Celui-ci peut-être à construire ou déjà construit. La maquette peut permettre de gérer l’objet ou avoir une vocation prospective (présenter une architecture qui pourrait exister).
C’est donc un fichier informatique. Selon le logiciel employé, le format de ce fichier est variable. Quel que soit le format et le logiciel employé, une maquette numérique peut être qualifiée de « maquette BIM » qu’à la condition qu’elle soit porteuse de données intelligentes. Un format standard (IFC) permet d’assurer l’interopérabilité entre les logiciels de maquette numérique BIM, dans le but de maintenir l’intégrité des informations lors des échanges entre les intervenants. « Interopérabilité » signifie la capacité possédée par un produit ou un système, dont les interfaces sont intégralement connues, à fonctionner avec d’autres produits ou systèmes existants ou futurs et ce, sans restriction d’accès ou de mise en œuvre.
On peut apparenter la maquette numérique « non BIM » à une maquette dite physique qui représente le bâtiment en 3D dans les proportions mais ne dispose pas d’informations détaillées sur le bâtiment. Vous connaissez probablement des logiciels qui permettent de dessiner en 3D. En général, les objets dessinés ne sont que des volumes sans aucune forme « d’intelligence ».
L’usage de la maquette numérique BIM
La maquette numérique BIM va en effet bien plus loin que la simple définition du bâtiment au format IFC. Elle porte une base de données associée au bâtiment et à ses objets. Cette base d’informations rend possible les analyses et simulations. Son usage modifie le rythme de la conception. Elle allonge le temps de la phase de conception, mais accélère la pratique des métiers qui en découle.
Le calcul thermique
Commençons par le calcul thermique où la réglementation devient plus exigeante, comme on le voit avec la future RT 2020. Ordinairement, la performance énergétique se définit avec plusieurs logiciels de simulation. La maquette numérique BIM accélère le calcul, puisque les caractéristiques des matériaux notamment, y sont déjà définies. Aussi, il est déjà possible de définir le type de projet (hôpital, logement, tertiaire, …), saisir le taux de surfaces vitrées, la qualité des matériaux et d’effectuer des calculs en faisant varier ces paramètres.
Une amélioration des échanges entre applications dédiées
Les formats NBDM et IFC sont complémentaires et utilisés successivement pour alimenter un logiciel de simulation thermique dynamique à partir de plusieurs applications. Ainsi, en reprenant les mêmes données avec plusieurs logiciels, le thermicien peut comparer des hypothèses, les approfondir et réaliser une simulation thermique dynamique (STD).
La maquette numérique et plus généralement le BIM améliore les échanges entre applications dédiées puisqu’elle facilite les transferts. Pour autant, tous les problèmes ne sont pas résolus, car la maquette numérique BIM est parfois trop lourde pour être manipulée directement dans une application. Alors un acteur du projet peut « alléger » la maquette en retirant des éléments non nécessaires pour son travail et extraire des parties ou des vues dans le cadre des sous-projets.
Quels sont les intérêts de la maquette numérique BIM ?
Compréhension des projets
La maquette numérique BIM permet d’abord de comprendre l’ouvrage avant qu’il n’existe physiquement (ce que permet aussi une maquette numérique en général). Voir l’ouvrage c’est commencer à le comprendre. Les techniciens et ingénieurs qui définissent le produit peuvent discuter plus facilement sur les solutions techniques possibles et peuvent choisir la meilleure.
Optimisation de la productivité
Selon une étude de Sia Partners sur les performances du BIM, l’utilisation de la maquette numérique optimise la productivité des entreprises du BTP en réduisant les temps de chantier et les dépenses énergétiques.
Adaptation du niveau de détails
D’une manière générale, le niveau de détail de la maquette virtuelle permet de représenter tout ce qui est visible d’une distance de 3-4 mètres. En effet, une maquette détaillée jusqu’à la dernière vis serait extrêmement lourde à manipuler. Le niveau de détail de la maquette doit être adapté à la phase du projet pour laquelle elle a été conçue.
Diffusion de l’information à tous
Mais son atout majeur réside dans la possibilité d’informer chacun des composants du projet sur ces caractéristiques techniques. De fait, toutes les phases de la construction s’y trouvent intégrées, permettant à chaque corps de métier impliqué de recueillir et de renseigner les informations dont il a besoin. Elle constitue, en effet, une base de données intelligente, dont il est très facile d’extraire des données ou faire des coupes dynamiques. Elle fournit tous les détails par zone, ainsi que les calculs et les tableaux de synthèse nécessaires.
Support d’auto-contrôle
Certains contrôles et simulations peuvent être réalisés sur l’ouvrage avant qu’il n’existe physiquement, permettant de détecter très tôt certains problèmes ou erreurs. Plus les problèmes sont résolus tôt, moins la correction coûtera chère à l’entreprise. L’intérêt n’est donc pas uniquement technique, il est aussi économique. Ainsi dans le domaine de la construction, la maquette numérique BIM est aussi un support pour l’auto-contrôle des professionnels au fur et à mesure de l’avancée du chantier puis durant la vie de la construction (par exemple concernant les exigences de la réglementation thermique française). Elle facilite également les réparations optimisées, comme la recherche de fuites.
Comment utilise-t-on la maquette numérique BIM ?
Organisation en sous-projets
Une maquette BIM ne sera pas décomposée en calques, mais il est possible de la décomposer en sous-projets. Ce partage permet de travailler en collaboration avec plusieurs équipes sur la même maquette numérique BIM, en attribuant un sous-projet différent à chacune d’entre elles. On gagne ainsi en efficacité.
On ouvre donc la possibilité de décomposer l’ouvrage dans une logique « terrain », qu’est la décomposition par métier. Cette décomposition ouvre la voie d’un travail collaboratif sur plusieurs maquettes « composites » autour d’une maquette centrale.
Cette notion de sous-projets est essentielle car tout le monde a un accès simultané à la maquette centrale et l’organisation en sous-projets implique une attribution de « propriétaires » des sous-projets.
Finalement, la maquette numérique BIM est l’innovation majeure du secteur du BTP car elle a un impact potentiel sur tous les métiers. Il s’agit d’un véritable avatar virtuel attaché à l’ouvrage, qui contient à la fois ses propriétés géométriques et des renseignements sur la nature de tous les objets utilisés (composition, propriétés, etc.). Cet outil est en passe de modifier profondément l’ensemble des processus de conception/construction, de maintenance et d’exploitation des bâtiments.
Le BIM (building information modeling, ou « modélisation des données du bâtiment ») s’impose comme la méthode de travail fondée sur la collaboration autour d’une maquette numérique. Cette maquette BIM s’enrichit des apports des différents intervenants sur l’ouvrage, de la conception à la construction, et de la réception à la fin de vie du bâtiment. Elle permet ainsi à toutes les parties prenantes de mieux représenter, anticiper et optimiser les choix, et ce, tout au long de la vie de l’ouvrage.